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5 septembre 2022

Compliqué ?

En épitaphe, elle avait décidé de mettre sur sa tombe « C’est compliqué ». Ses fils ne l’avaient pas contrariée.

Oui, pour lui tout avait été compliqué, dès la première année de leur mariage jusqu’à sa mort. Ce n’est bien sûr pas ce qu’avait dit le curé lors de la cérémonie funèbre, mais c’est exactement ce qu’elle avait choisi de lui confier le lendemain, devant sa tombe.

Après avoir regardé autour d’elle afin de vérifier si elle était seule dans le cimetière, elle avait dit à voix haute.

-          Je crois que maintenant, pour moi, tout sera plus simple. J’espère qu’il en sera de même pour toi pour des siècles et des siècles. Amen.

Elle sourit à la petite photo qu’elle avait choisi de mettre sur la pierre tombale, puis elle partit légère vers la sortie.

 

PS : prochain texte, vendredi.

23 août 2022

L’avis de…

Il avait fait passer l'avis de décès de sa mère dans le journal, mais elle n’était toujours pas morte. Comment allait-il expliquer ça ?

Pourtant l’incendie avait eu lieu, les pins avaient brulé, le jardin avait perdu arbustes, fleurs et fruits,  la maison  avait brûlé aux trois quart, la femme de ménage aussi avait brûlé… mais sa mère, non. Une intervention divine ?  Pourtant elle disait pis que pendre de Dieu, comme de son mari - mort il y a 2 ans - comme de lui, son fils, toujours vivant à cinquante ans. Mais jusqu’à quand ? Il lui semblait que sa respiration s’amenuisait et il était à bout de souffle quand il montait les marches qui le menaient au clocher de l'église d'Etrangeville.

Il devait passer à la dernière phase pour la faire disparaître, mais celle-ci exigeait concentration, courage, actes de contrition, prières et, surtout, la grâce de Dieu. Mais l'aurait-il, lui, cette grâce ? Pourtant, il était prêtre...

 

PS : prochain texte, lundi prochain.

8 juin 2022

L’épitaphe

Sur le cercueil de son époux, elle avait demandé aux pompes funèbres d’écrire l’épitaphe suivante : « Je travaille. Chut ! » L’employé lui avait demandé si elle voulait ajouter quelque chose. Oui avait-elle répondu, précisez aussi : « J’ai un dossier urgent à rendre ».

-          Et pour les couleurs  - avait précisé le vendeur  - des lettres blanches,  noires, argent, dorées à la feuille d'or ?

-          Les moins chères, bien sûr.

L’employé se dit que pour une fois, les choses se déroulaient très rapidement et sans pleurs. Oui, cette femme avait l’air contente de ses choix et peut-être même – pensa-t-il – se sentait-elle rassurée de voir que pour une fois, son conjoint travaillerait sans s’arrêter pour des siècles et des siècles, et le tout pour son plus grand bonheur…

PS : prochain texte, samedi.

1 juin 2022

Les frontières ?

Ainsi commença le discours de la nouvelle présidente féministe :

« Ouvrir ou fermer les frontières, telle est la question, et quand il s’agit de frontières, FRONTEX est aux avant-postes de la soi-disant protection de l'Europe qui, en fait, n’est qu’une oppression déguisée. Après les damnés de la terre, viennent les damnés de la mer, et suivent derrière eux, tous les autres damnés, celles et ceux qui sont exploités sexuellement, économiquement ou humainement.  

Je sens sur nos fronts, la texture des mers et des mots, et je suis sûre que nous créerons, ensemble, une bible laïque qui sera le chant de la nouvelle politique des pays sans frontières. »

Et, devant une foule surprise - sur l’Ode à la joie - elle entonna, de sa puissante voix de contralto, l’hymne de « l’Ouverture des frontières ». Un hymne que nul ne connaissait encore, mais qui deviendrait, elle en était sûre, l'hymne de la solidarité.

PS : prochain texte, samedi.

 

 

 

 

 

6 mai 2022

Méditations

En relisant « cinq méditations sur la mort / Autrement dit sur la vie » de François Cheng, j’ai repensé à Patricia, amie de blog, puis amie sur le chemin de la vie, avant qu’elle ne sorte de ce chemin-là, et parte dans un  monde qui sera le mien aussi, un jour. Son blog s’appelait « Un autre reg’art »

Ce poème de François Cheng, je le lui dédie d’ici-bas, en espérant que « les cieux » - s’ils existent – ouvrent leurs nuits étoilées et que son âme ainsi, puisse lire ce que la poésie seule peut dire.

 

Parfois les absents sont là

Plus intensément là

Mêlant au dire humain

Au rire humain

Ce fond de gravité

Que seuls

Ils sauront conserver

Que seuls

Ils sauront dissiper

Trop intensément là

Ils gardent silence encore.

 

PS : prochain texte, mardi.

14 décembre 2021

Les murs de la ville

Elle avait tagué tous les murs de la ville avec cette interrogation : « A quand la fin des couteaux en famille ? ».

Lors de son passage en comparution immédiate le juge lui avait dit.

-          Vous ne croyez pas que vous allez un peu loin ?

Et elle lui avait répondu froidement.

-          On voit bien que vous n’êtes pas une femme. Féminicide, ça vous dit quelque chose ?

Etrangement, le juge avait rougi. Avait-il, lui aussi, eu envie de tuer sa femme au couteau ?

 

PS : prochain texte, vendredi.

3 décembre 2021

Souvenir

Il disait l'avoir aimée dix ans plus tôt, mais le souvenir qu'il lui avait laissé était celui d'un homme flou et mou. Non, elle n'irait pas à ce rendez-vous du "souvenir". A son âge- 45 ans - il lui fallait à tout prix éviter les hommes à tendance vague.

 « Ouvrir les yeux et résister » était sa nouvelle devise, car le variant d'Afrique du Sud et le variant électorale diminuaient son moral de moitié. S’il comptait sur elle pour se trouver un foyer d'accueil à Noël, non. D'ailleurs, elle avait toujours détesté Noël, et elle avait toujours détesté son prénom, Bernard ; le même prénom que ce philosophe suffisant, ami des médias…

PS : prochain texte, mardi.

12 octobre 2021

Le travail

Un nouveau vaccin venait d’être créé par le laboratoire pharmaceutique « Number one » : le vaccin anti-déprime. Un vaccin que seuls les pays occidentaux pouvaient acheter : extrêment cher, mais extrêmemnt utile aussi. Notre état néo-libéral le finançait, mais les grands patrons apportaient  leur soutien. Pourquoi ? Parce que non seulement le vaccin éffaçait toutes les déprimes possibles et imaginables mais, par ailleurs, il donnait au travailleur un regain d’énergie au travail. Et si, par hasard, le travailleur concerné était au chômage, sa vitalité et son désir de travailler était tels, qu’il s’avérait capable d’ accepter tout travail quel qu’il fût, même à un salaire nettement inférieur. Mais - et notre président E. Cromanu n’en parlait pas – si la déprime disparaissait, l’un des effets secondaires du vaccin anti-déprime pouvait être la mort.  Parce que oui, le travail peut tuer, mais cela avait-il une quelconque importance ? Plus de décès rapides ne voulait-il pas dire aussi, moins de retraites à financer ?

PS : prochain texte, samedi.

9 octobre 2021

L’exutoire

Quand il allait voir sa mère en maison de retraite –  une fois tous les quinze jours, jamais moins - il en ressortait épuisé, tellement épuisé qu’il avait décidé de passer à une visite une fois par mois.

Sa mère était une reine déchue, « aveugle » et autoritaire. Elle imaginait encore que  ses sujets la réverraient. Et, comme la reine d’Alice au pays des merveilles, elle coupait la tête de ses sujets s’ils osaient s’opposer à sa volonté. Son peuple de serviteurs était bête bien sûr, vieux - mais c’était le peuple de l’EHPAD* – et  ne méritait aucunement qu’elle prenne ses repas avec lui. Elle prenait déjeuner et dîner dans sa chambre ; le miroir que le peuple lui tendait l’affectait trop. Elle préférait cette chambre royale où seuls ses soignants et soignantes lui rendaient visite pour lui donner son sérum de longévité.

Son fils – qui vieillissait bien plus vite qu’elle -  se demandait combien de temps cette reine vivrait et, combien de jours et de mois, l’exutoire qu’il était devenu, pourrait supporter de rester une fois par mois dans cette chambre d’attente de la mort…

 

* établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes

PS : prochain texte, mardi.

23 août 2021

Un demi

Tous les jours, à 11 heures sonnantes, il est au comptoir avec sa chienne Rita. Elle a du caractère Rita, pas comme lui ; d'ailleurs c'est elle qui lui a dit de se faire vacciner. Il tend son pass sanitaire au patron du bar et elle se place  derrière lui, pour  lui faire croire que c’est lui le chef. Il demande un demi, suivi d’un deuxième et d’un troisième. Après avoir vidé le troisième il appelle sa chienne qui ne bouge pas, forcément, elle est tout près de lui. Son voisin de comptoir – encore lucide -  lui signale par deux fois que la chienne est derrière lui mais il ne voit rien, les trois bières avalées - plus celles qu’il s’est enfilées ailleurs – lui ont tapé sur la tête. Le patron du bar, d’humeur joyeuse, lui dit.

-          C’est pas un labrador qu’il te faudrait toi, c’est un chien policier.

Il laisse un billet sur le comptoir et lorsqu’il part, sa chienne le suit, mais sans zigzaguer car Rita, elle, ne boit jamais d'alcool.

 

PS : prochain texte, vendredi.

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