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Presquevoix...
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31 octobre 2020

La garde à vue

Avant, il empoissonnait sa femme à temps partiel, mais depuis qu’il était à la retraite, c’était à temps complet et elle n’en pouvait plus. Dans un élan de courage elle lui dit.

-          Si tu me dis une parole, une seule parole insupportable, je me convertis à la religion musulmane.

Il ne répondit rien mais sortit un couteau  de boucher d'un sac qu'il avait laissé sur le canapé – il faut dire qu’il avait travaillé vingt ans au rayon viande d’Intermarché et que le hachoir était son outil quotidien.

Elle lui répondit.

-          Je ne te conseille pas, Jean, car sur mon portable, j’ai l’application antidécapitation* et toi non plus, tu n’en sortiras pas vivant.

Dix mintues plus tard, il était dans la voiture des flics et le soir même, elle se buvait un muscadet avec sa voisine de palier pour fêter le séjour de son mari en garde à vue…

 

*caricature vue sur le Charlie Hebdo de cette semaine.

28 octobre 2020

Le gigolo

Il disait que celui qui n’aime qu’une femme est un égoïste, alors il en a aimé des mille et des cents et sa vie a ressemblé à une joyeuse symphonie.

Sauf qu’à la mille cent unième, après une gigue où les « olé » ont dépassé les bornes, il est tombé raide mort sur son lit de gigolo. Sa dernière « amie » n’a rien pu faire et lui a fermé les yeux, lui qui jamais ne voulait les garder fermer quand il faisait l’amour.

A son enterrement, à l’Eglise de l’Immaculée Conception, il y avait tant et tant de femmes, que le curé a fait un malaise. C’est Marie et Marie qui l’ont relevé.

Anne a commencé alors l’éloge funèbre et des rires étouffés s’entendaient dans la nef ; le chœur lui, restait silencieux. Elle a dit.

- les femmes que tu as envoyées au ciel avaient tous les âges, mais toi un seul, l’âge de la déraison. Toutes, ici présentes, nous étions la source de tes revenus, nous le savions et l’acceptions. Quel autre métier aurais-tu pu faire avec de tels atouts ? Trois, ai-je comptés : ton humour, ton goût et ton divin pénis. »

Au moment où le mot « pénis » a été prononcé, le curé s’est levé, les joues rouges, la voix rauque ;  et là, les rires ont immédiatement cessé !

 

PS : prochain texte samedi 31 octobre

 

24 octobre 2020

Divin

Sa mère l’avait appelé Divin et il ne s’en était jamais remis. Le prénom peut-il être un mauvais présage ?

Le premier octobre, jour de son anniversaire, il s’était rendu au château de Versailles en fin d’après-midi, porteur d’un long drap noir qu’il avait noué sur ses épaules et qui lui couvrait le corps. Son visage, lui, avait un masque noir.  Il arpentait les trottoirs en répétant : « Je suis le monarque de droit divin. »

Les gens le laissaient passer, étonnés de cette voix tonnante, en boucle. Il s’arrêta immédiatement quand une femme toute de blanc vêtue s’adressa à lui en disant.

-          Et moi je suis Marie Antoinette, vous souvenez- vous de moi ?

-          Non madame.

-          Le Trianon ne vous dit rien ?

-          Cessez de me tourmenter madame, laissez le roi passer.

-          Mais le roi a besoin de moi.

Elle s’approcha de lui et l’encouragea à mettre son bras sous le sien, ce qu’il fit  et, ensemble, dans une marche triomphante – ou presque – il allèrent vers l’ambulance où les attendaient deux infirmiers…

 

PS : prochain texte mercredi prochain.

 

22 octobre 2020

la tête

Durant les émissions qu’ils animaient ensemble sur une chaîne nationale, leur duo était merveilleux. Une fois l’émission terminée, commençait la soupe à la grimace de ce couple marié depuis vingt ans. Les jeux de mots – où lui excellait - occupaient leurs soirées, sauf que ces jeux finissaient par lui tourner la tête et, chaque nuit, la Reine de cœur apparaissait dans ses rêves en criant : « Qu’on lui coupe la tête ! »

Elle se demandait si son mari n’allait pas la décapiter  un jour…

20 octobre 2020

Professeur, dans "l'école de la confiance"*, comme ils disent !

Comme me le disait, il y a de longues années, une amie amoureuse de la contrepèterie : « Quel beau métier professeur ! ».

Mais les temps ont changé, qu’il s’agisse de reconnaissance, de salaires, de considération, de formation, le métier de professeur n'enthousiasme pas les jeunes, peu sont ceux qui souhaient l'embrasser ; on dirait même, d'ailleurs,  que les professeurs ne sont pas aimés.  Pourtant, on avait cru pendant le confinement que… , mais non, grossière erreur.

Hélas, il faut admettre que notre Education, dite Nationale, soutient les professeurs, mais seulement après-coup, si je peux me permettre.

* L’école de la confiance, loi promulguée au journal officiel le 28 juillet 2019.

Cet article d'Olivier Christin - l'éducation nationale, creuset délaissé de la démocratie - historien, est excellent.

 

 

 

18 octobre 2020

Le roman

Il avait la manie d’écrire des choses éparses qui s'accumulaient sur des carnets. De la matière brute, disait-il assez content de lui. Sa femme se demandait s’il écrivait vraiment et souvent elle disait.

-           Mon petit doigt me dit que tu n’écris pas quand tu dis que tu écris.

-          Envieuse, répondait-il simplement.

-          Moi envieuse ? Mais mon ami, j’écris moi-même mais pas dans un carnet.

Il la regarda surprise. Jamais il ne l’avait vu en train d’écrire. Il est vrai qu’il la regardait peu, penché qu’il était sur ses carnets ; raison pour laquelle ce qu’elle lui dit un soir l’estomaqua.

-          J’ai envoyé mon roman chez un éditeur et il a été accepté.

Il s’étrangla. Une fois remis, il lui demanda.

-          Et le titre de ton roman, c’est quoi ?

-          « Le blanc efface tout », c’est toi d’ailleurs qui m’a inspirée.

-          Moi ?

-          Oui, toi et tes carnets.

Il resta enfermé dans son bureau pendant six jours. Le septième, il sortit et dit à sa femme qu’il avait terminé son roman.

-          Et le titre, c’est quoi ?

-          « Les cases blanches et noires », c’est toi, d’ailleurs qui m’a inspiré.

-          Parfait, sourit-elle. Et pour l’éditeur ?

Là justement résidait le problème. Quel éditeur accepterait un livre qui reposait, pour l’essentiel, sur des cases vides de mots ?

 

PS : prochain texte mardi prochain.

 

15 octobre 2020

Le patron

Chaque fois qu’elle prenait le bus avec René, il lui donnait une petite leçon de vie ; elle était si jeune. Ce jour-là, il avait écrit la phrase du jour sur son journal : « Il faut désapprendre à obéir. »

Elle lui avait immédiatement répondu.

-          Drôle de boulot, non ?

Et il avait conclu, sur son journal : « Soit on résiste, soit on crève ! »

Résister, mais jusqu’à quand ? Lui avait soixante ans et elle vingt trois. Ils travaillaient dans la même entreprise où le patron – Un paternaliste disait René – avait sur ses employés un étrange regard, entre dureté et bienveillance.

Souvent, René disait à Solène.

-          Bienveillance mon cul. Un patron n’est jamais bienveillant, sache-le.

Sans doute avait-il raison. D’ailleurs, ce jour-là, à cause de la grève des transports, ils arrivèrent avec 15 minutes de retard et la première chose que le patron avait dit à Solène, c’était.

-          Grève ou pas grève des transports, on arrive à l’heure Mademoiselle

Et elle avait dit à voix basse, sans que le patron ne l’entende.

-          Alors c’est grève ou crève, quoi !

René avait souri, la petite commençait bien !

 

PS : prochain texte, dimanche.

12 octobre 2020

*photo de fontaine gentiment prêtée par Chinou,

 

chinou

 

*photo de fontaine gentiment prêtée par Chinou, dont le blog nous fait voyager au pays des aquarelles ; elle y excelle.

 

La fontaine

 

Elle marchait dans la campagne, seule et, « un peu à l’écart, à l’orée d’un bois », elle découvrit la fontaine « surmontée d’une croix ». Elle aimait les croix, souvenir d’une enfance où la religion avait su garder nombre de fidèles dans le village de sa grand-mère. Leur lieu de prédilection, l’église et son curé, aussi sourd que bavard.

Errer et se perdre, se dit-elle en cette fin de randonnée où elle avait marché 6 heures durant sans avoir rien mangé. Elle écouta le doux bruit de l’eau. D’habitude si pudique, elle retira ses vêtements et s’allongea nue sur l’herbe, le long de la fontaine. C’est à ce moment-là qu’elle entendit une voix grave.

-          Vous vous appelez Marie ?

Elle s’assit effrayée, protégeant sa poitrine, et vit l’homme à la barbe dévorante qui, une besace à la main, l’observait le visage dur. Elle lui mentit.

-          Oui, je m’appelle Marie, et vous ?

-          Moi je m’appelle Adam, et la femme que je recherche s’appelle Eve. Elle m’a trompé. Comme Marie ne m’a jamais fait de mal, vous serez épargnée. Au revoir Marie, que Dieu vous garde.

Une fois l’homme parti, elle plongea son visage dans l’eau froide puis s’approcha de la croix. N’était-ce pas lui qui l’avait sauvée ? Son père aurait voulu l’appeler Marie, mais il avait disparu avant sa naissance et sa mère l’avait appelée Eve, un prénom qu’elle avait toujours détesté et détesterait toujours.

 

PS : prochain texte, jeudi prochain.

 

10 octobre 2020

Départ en retraite

Pour fêter le départ en retraite de leur amie, elles avaient décidé que le meilleur cadeau à lui offrir c’était la disparition de son conjoint.

« Paix, calme et tranquillité », avaient-elles dit en riant, pensant que la disparition de ce « vampire », incapable de travailler ou de bouger un quelconque de ses dix doigts, lui apporterait un bonheur sans nom.

Le fait est qu’il disparut – un décès qui leur coûta d’ailleurs fort cher à toutes les quatre - mais un an plus tard, leur amie trouva un second vampire, à l’égal du premier, ou peut-être pire…

8 octobre 2020

Vous avez dit limites ?

Le professeur de mathématiques débuta le cours de la façon suivante.

-          Nous allons étudier les suites, et ensuite viendront les limites, et les limites, bien sûr, n’ont pas de secret pour vous.

Erwan leva la main.

-          Oui Erwan ?

-          Eh bien monsieur, quand vous dites limites, vous voulez parler de quelles limites exactement ?

Le professeur sourit, mais ne fournit aucune réponse. Erwan en profita pour ajouter.

-          Parce que question limites pédagogiques, il y en a qui sont très forts !

Aucun éclat de rire ne suivit cette réponse. La classe savait que le professeur n’avait aucun humour.

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