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Presquevoix...
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28 septembre 2020

Tatouage

- Pourquoi avez-vous volé un voilier alors que vous n’y connaissez rien en bateau ? Lui avait demandé le commissaire qui détestait les voiliers.

Le voleur, un mètre quatre-vingt-dix, la cinquantaine, rasée, et des tatouages plein les bras lui avait répondu.

-          Et alors ? Voler c’est avoir du pouvoir. Et puis sur mon tatouage, regardez, j’en ai un de voilier.

Le commissaire regarda son bras et découvrit, sous deux seins de femme, un bateau à trois mats.

-          Joli, fit-il pour amadouer le type.

-          Et au-dessus du voilier, c’est les seins de mon ex-femme, comme des étoiles.

-          Etonnant.

Le commissaire, à dix ans de la retraite, en avait un peu marre des cinglés qui passaient au poste de police, mais il essayait de faire face sur cette mer orageuse, toutes voiles dehors.

-          Donc, ajouta-t-il, vous aviez soif d’inconnu, d’évasion, c’est ça ?

-          Ouais. J’en ai marre de Fécamp et la mer, c’est tout ce qui me reste.

-          Comment ça ?

-          Ben ouais, la mienne de mère est morte il y a deux jours, alors…

Le commissaire ne dit rien, mais il faillit verser une larme car sa mère aussi habitait au cimetière depuis le mois dernier ; lui aussi aurait bien fait une croisière sur la vaste mer pour se souvenir du passé et oublier que le prochain qui devrait disparaître, ce serait lui…

 PS : prochain texte jeudi prochain.

26 septembre 2020

Les tricots

La veille, Anna lui avait dit qu’elle avait un monceau de sacs avec ses tricots en cours depuis 20 ans.

-      Pourquoi 20 ans ?

-      Eh bien parce qu’il y a vingt ans - et exactement le 25 septembre 2000 - j’ai compris.

-      Compris quoi ?

-      Que je devais tricoter.

Elle évita de lui demander pourquoi elle avait décidé de tricoter aussi longtemps, car elle savait qu’il n’y aurait pas de réponse, tout comme il n’y aurait pas de réponse si elle lui demandait pourquoi elle avait commencé le 25 septembre.

Anna faisait partie de ces personnes qui ressemblaient à des îles perdues dans l’océan mais qui jamais, oh grand jamais, ne terminerait le bateau en tricot qui leur permettrait de quitter les terres du passé.

 

 

24 septembre 2020

La case

Depuis le début du mois de septembre, quand il faisait ses mots croisés, il se rendait compte qu’il avait une case de vide. Il décida donc, de sa propre initiative, d’entrer à l’hôpital psychiatrique…

 

21 septembre 2020

Horoscope

Dans Paris Normandie elle avait lu l’horoscope de la Vierge, le sien, et au thème amour il disait : vous pourriez très bientôt faire une rencontre assez prometteuse.

Enthousiaste, elle passa sa matinée à marcher dans les rues et à passer d’homme en homme en posant la question suivante : « Ne seriez-vous pas la rencontre assez prometteuse que je dois faire ? ", mais sans succès. Jusqu’au moment où elle eut la certitude de tomber sur « la fameuse rencontre », enfin je veux dire, sur l’homme.

Il avançait dans la rue, sans masque et sous un sombrero. Peut-être était-il mexicain, qui sait ?

Elle lui parla aussitôt espagnol ; la langue de son grand-père paternel. Lui répondit en français, mais avec un fort accent. Elle sourit et dit.

-          Alors, vous êtes… ?

Et il répondit du tac au tac.

-          Oui, je suis.

Une semaine plus tard, il lui expliqua ce qu’il était exactement, et si elle l’avait su, elle aurait évité de le prendre pour « l’homme ». Sauf que maintenant, il était trop tard…

 

PS : prochain texte, jeudi 24 septembre.

19 septembre 2020

Le chemin

Il écrivait des définitions de maladies, toutes les maladies possibles et imaginables et ce, depuis son enfance. Et, à l’âge de 12 ans, il a écrit des certificats médicaux en imitant ceux de sa mère, hypocondriaque notoire ; enfin c’est ce que la famille de son père disait. Mais était-ce vrai ?

Pour sauver sa mère, il avait lui-même suivi, à l'âge de 18 ans, le chemin de la médecine. Hélas, dès la troisième année, il avait dû arrêter ses études en raison de crises d’épilepsie à répétition.

-          Il est bien comme sa mère, avait l’habitude de répéter son père.

Lui ne disait rien car il ne se voyait pas. Pourtant, il n’était ni comme sa mère, ni comme son père, et il suivait un parcours étrange qui le mena, à l’âge de 30 ans, sur le chemin de Compostelle, son bâton de pèlerin à la main et sa besace sur le dos.

Une besace où les évangiles lui disaient que ce n’était pas par hasard qu’il s’appelait Christophe…

17 septembre 2020

discorde

Nombreuses étaient celles qui avaient décidé de mettre un "crop top" pour aller au lycée, et l'entrée leur avait été interdite.

- Masque, gestes barrières et tenue correcte exigée avait dit le proviseur.

L'une, effrontée mais masquée, s'était autorisée à lui dire.

- Vous n'avez qu'a pas regarder mon ventre et vous ne verrez rien.

Mais était-ce si simple ?

Il est vrai qu'avec la chaleur torrentielle qui frappait toutes les académies de France et de Navarre, pourquoi ne pas supprimer un masque non obligatoire, celui qui cachait le ventre ?




14 septembre 2020

Le livre

Elle avait compris que quelque chose avait changé chez son mari quand il avait commencé à manger des yaourts. Certes, elle aurait pu faire semblant et ne pas en parler. Mais elle préféra entrer sur l’arène.

-          Bizarre non, ce goût pour les yaourts alors qu’avant tu n’en mangeais jamais ?

-          On n’a pas le droit de changer de goût ?

-          Bien sûr que si, ajouta-t-elle en souriant, mais à cinquante ans, c'est rare !

Seulement, elle n’en resta pas là. Et des yaourts, elle passa à sa table de nuit. Elle y découvrit, au fond du tiroir, un roman, lui qui jamais ne lisait de roman.

Le soir même elle en commença la lecture. Quand son mari se coucha, fatigué par ses deux heures « de travail » à l’ordinateur, il se pencha vers elle afin de l’embrasser.

-          Un nouveau livre ? lui dit-il.

-          Oui, « l’Amant de Lady Chatterley ». Tu l’as déjà lu ?

-          Oh moi, tu sais, les livres…

Elle n’ajouta rien et le laissa s’endormir. C’est à ce moment-là qu’elle lut et relut la petite phrase écrite au stylo plume en haut de la première page : « A toi qui m’as dit qu'il était plus facile d'être amant que mari… »

 

PS : prochain texte jeudi car le travail me "tue" ;)

 

 

11 septembre 2020

Rencontre

A l’âge de 85 ans, il n’avait toujours eu aucune histoire d’amour ; la peur d’être abandonnée, se plaisait-il à penser.

La première fois qu’il est descendu dans la salle de restaurant de la maison de retraite où il avait décidé de s’installer car la solitude lui pesait, il fut étonné de voir que ses deux voisines de table étaient des femmes.

-          Peu d’hommes ici, dit l’une en voyant son air étonné. Normal, ils meurent plus tôt.

La deuxième femme ne dit rien.

-          Elle ne parle pas, dit la première, elle a fait vœu de silence et ça fait deux mois que ça dure.

Il sourit et répondit que lui non plus n’était pas trop bavard.

-          Je parle pour trois, a-t-elle ajouté. Et votre femme ?

-          Je n’ai pas de femme.

-          Elle est morte ? poursuivit-elle.

Son visage s’obscurcit soudain et il toussota.

-          Désolée.

-          En fait, je n’ai jamais eu de femme.

-          Eh bien moi, je n’ai jamais eu de mari. Célibataire du début jusqu’à la fin.

Il avait envie de lui poser une question mais hésitait. Était-ce la peur de mal débuter son séjour dans ce dernier lieu de vie ?

-          Vous pouvez me poser une question si vous voulez, lui dit-elle.

-          C’est rare que j’en pose. Je vivais avec un chien.

-          Saine compagnie. Et moi avec des chats.

Une fois l’entrée terminée, il se décida.

-          Vous n’avez pas trouvé chaussure à votre pied ?

-          Disons que mon pied était trop grand.

Tous deux rirent de bon cœur. Au moment du dessert, il lui dit.

-          Vous aimez le scrabble ?

-          Je préfère les mots croisés.

-          Alors un jour de scrabble, un jour de mots croisés, consentit-il.

Et les deux ans qu’il passa « Aux jours tranquilles » se déroulèrent entre scrabble et mots croisés avec Mona – c’est ainsi que s’appelait sa partenaire de jeu.

« Quand je pense que René n’aurait jamais pensé vivre aux côtés d’une femme » dit-elle le jour de son enterrement en ajoutant : « René était le roi du scrabble et il le demeurera ! »

 

PS : prochain texte lundi prochain.

9 septembre 2020

Je ne suis pas…

Il commençait souvent ses phrases par « je ne suis pas… mais ». Ces derniers temps j’avais droit à « je ne suis pas médecin mais… », « je ne suis pas président mais… », je ne suis pas professeur mais… », « je ne suis pas voyant mais ». J’écoutais patiemment la litanie jusqu’à ce qu’un jour de mauvaise lune, je lui réponde.

-          Dix ans ou presque que je t’entends dire « je ne suis pas mais », alors bon : qu’est-ce que tu es, finalement ? J’aimerais bien le savoir, d’autant plus que je vis avec toi !

Il n’a rien répondu et  le repas a continué dans le plus grand des silences…

 

7 septembre 2020

Le rapport

Il a mordu l’oreille de son voisin jusqu’au cartilage. Quand le policier  lui a demandé pourquoi, il lui a répondu qu’il en avait envie depuis longtemps ; " 2 ans d'ailleurs ", a-t-il ajouté.

-          Je ne vous demande pas le nombre d’années où vous en avez eu envie, mais la raison de votre geste, a répondu le policier.

L’homme l’a regardé en silence et a fini par dire.

-          C’était l’amant de ma femme. Alors, moi aussi j’ai décidé d’avoir un petit plaisir après 2 ans d’abstinence.

Le policier n’a rien répondu et a commencé à taper son rapport…

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