Le ciel peut-il attendre ?
Soudain il entendit sa femme crier dans la cuisine.
- Alors, tu viens !
Il répondit aussitôt.
- Deux secondes, je regarde un ciel de Boudin !
Aussitôt elle enchaîna.
- Tu te fiches de moi ? Les boudins t’attendent dans la cuisine, ceux qu’on mange à midi, bien sûr, avec la purée que tu es censée faire !
Il s’était toujours demandé – depuis 10 ans qu’il vivait avec Marianne – comment son esprit pratique avait englouti sa vie. Ils ne vivaient pas dans le même monde, mais comment lui dire qu’il se fichait de la purée et des boudins ?
Pour lui, regarder Boudin suffisait à le rendre heureux. Sa lumière, ses couleurs, la matière qu’il brossait, ses nuages, ses ciels. Un seul ciel et l’extase surgissait.
- Bon, tu viens faire la purée, papa, dit sa fille qui venait juste d’arriver dans la chambre.
Il regarda l’enfant avec une certaine tristesse avant de quitter Boudin. Deviendrait-elle une Marianne bis ? Pourtant, il avait insisté pour qu’elle s’appelle Juliette….