Un instant de folie
La dernière fois que l’oeil lui était apparu, c’était sur les volets d’une maison qu’elle ne connaissait pas, et cette fois, il lui avait parlé.
- Je suis l’œil, lui avait-il dit d’une voix grave.
Que lui répondre ? Elle s’était tue et il avait continué.
- Je vois en toi quelque chose de violent qui demande à sortir. Raconte.
- Raconter quoi ?
- Ce qu’il y a là, maintenant, dans cette âme en train de bouillir.
Et à ce moment-là – dieu sait pour quelle raison – elle avait sorti sa colère, une colère qui datait d’avant… d’avant quoi, d’ailleurs ? Elle ne le savait même pas.
- Je suis celle qui veut tuer la religion patriarcale. Je hais ces pseudos dieux vivants qui nous dominent, je hais ce Dieu qui délègue aux mâles ce pouvoir qui remplit leurs âmes vaines et délègue aux femmes les tâches subalternes. Je veux que règne le matriarcat, protecteur de l’égalité inconditionnelle.
Après ce pamphlet, elle s’arrêta, à bout de souffle. Était-ce l’intrusion du coronavirus en elle ? Elle eut peur.
L’œil lui répondit.
- Repose-toi maintenant. Dès dimanche, tu tueras Dieu et le calme reviendra.
Elle n’en croyait pas ses oreilles, l’œil lui demandait de passer à l’acte ?
Et c’est ce qu’elle fit le dimanche suivant, dans l’Eglise du Sacré cœur, la seule église ouverte. En ville, les rues étaient désertes, inutile de courir, il lui suffisait d’aller vers l’autre monde, celui du matriarcat…
PS : photo prise à Saint Prix, 95.