La lettre
Pourquoi avais-tu décidé de vivre dans cette tour exiguë ? Je ne l'ai jamais su. De toute façon, maintenant tu es mort et c’est mieux ainsi. Amen !
Si tu lis cette lettre, tu pourras croire que je t’en veux. Mais non. Je dois dire que je n’ai jamais été aussi soulagée par la mort de quelqu’un. Tu vois, tu m’as presque fait plaisir. Juste un bémol, tu aurais pu éviter de te mettre en scène de cette façon. Tout le monde t’en a voulu. Sans parler de maman qui n’arrête pas de répéter : « Il n’y avait que lui pour se passer la corde au cou. Personne d’autre n’a jamais su le retenir. »
Ah, au fait, il y a une semaine nous avons eu la visite d’une certaine Lydie. Elle voulait te voir. Nous lui avons dit que tu étais mort et elle a fondu en larmes. Quarante ans qu’elle ne t’avait pas vu et elle a fondu en larmes ! Maman m’a alors appris que tu avais été le « Casanova » de La Ferté Macé, ce que j’ignorais totalement.
Je glisse ce papier dans le pot de jacinthes que je mets au pied de la tour, côté pré, peut-être viendras-tu errer dans ce lieu…
Ta fille,
Céline
PS : je crois que c’est la première lettre que je t’écris. Mais il n’est jamais trop tard pour bien faire.