Le lobe
Quand j’ai dit à mon patron que son analyse de marché était fausse parce qu’elle ne tenait pas compte de certains paramètres importants, il s’est rué sur moi et m’ a arraché le lobe de l’oreille droite. J’ai hurlé comme un malade et des gens sont arrivés dans le bureau. Ils ont réussi à nous séparer. Après le départ de mon patron – des infirmiers en blouse blanche l’ont emmené avec eux - je me suis mis à quatre pattes à la recherche du lobe disparu. C’est à ce moment-là que sa femme – le DRH l’avait fait appeler vu la gravité de la situation - est entrée.
- Vous cherchez quelque chose, m’a-t-elle dit ?
- Oui, mon lobe, ai-je répondu sans lever les yeux du sol.
Et elle m’a répondu.
- Ah bon, vous aussi ? J’ai l’impression que mon mari devient cannibale. Il a fait la même chose avec son fils, quand celui-ci lui a annoncé son échec au bac. Le problème c’est que lui, son lobe, on ne l’a jamais retrouvé. J’espère que vous aurez plus de chance.
- Je l’espère aussi, ai-je répondu tout en poursuivant mes recherches à quatre pattes.
- Bon courage, a-t-elle dit avant de sortir du bureau.
Depuis cette terrible histoire, mon patron n’est toujours pas revenu. Il paraît que son séjour à l’hôpital se prolonge car les psychiatres craignent une rechute. Quant à mon lobe, j’ai dû en faire mon deuil. Depuis, je me laisse pousser les cheveux…