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Presquevoix...
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2 octobre 2011

Entre deux eaux

armandoIl avait regardé par-dessus son épaule et lui avait dit.

-    Ne me dis pas que tu lis encore un roman portugais !  Tu ne pourrais pas lire autre chose ?

Elle s’était retournée et avait regardé l’homme, surprise. C’était la première fois qu’elle le voyait. Son visage, tout comme sa voix, exprimaient la colère. Pour qui se prenait-il ?

-    Monsieur, je ne vous connais pas.

Il eut un vague sourire.

-    C’est tout ce que tu trouves à me dire ?

Elle se contenta de répéter.

-     Monsieur je ne vous connais pas, j’en suis sûre.

L'homme fouilla dans son sac à dos, sortit une photo et la lui tendit. Elle vit une femme inconnue qui lisait un livre face à la mer, le même livre qu’elle : « As duas águas do mar »*.

-    Tu te souviens quand même du jour où j’ai pris cette photo ? Ajouta-t-il agacé.

Soudain, elle entendit quelqu’un  au loin qui criait  « Papa ! Papa ! » tout en s’approchant d’eux. L’homme se retourna. Une fois à leur hauteur, la jeune fille s’adressa à elle.

-    Mon père s’est encore perdu, excusez-le !
-    Il n’y a pas de mal, répondit-elle, je crois qu’il m’a prise pour quelqu’un d’autre.

Elle montra la photo que l’homme tenait encore à la main, puis son livre et dit à la jeune fille.

-    Toutes les deux, nous lisons la même chose.

Le visage de la jeune fille se rembrunit et elle murmura.

-    Oui, mais elle, elle est morte l’année dernière sans jamais terminer son livre et lui ne l’accepte pas.

Le père et la fille repartirent.  Quelques instants plus tard,  elle leva les yeux de son livre et crut les voir loin, très loin, longeant la mer qui s’était retirée.

* « les deux eaux de la mer »

PS : texte écrit à partir de cette photo, gentiment prêtée par Armando du blog « nuages de photos »  

Commentaires
G
pagenas : sans doute un effet du livre que je lis "avant de dormir"...<br /> <br /> D. Hasselmann : aigues-aguas, joli. Je viens de voir des photos d'Aigues mortes que je ne connaissais pas.<br /> <br /> Caro : merci.<br /> <br /> Lautreje : se perdre déstabilise certainement, Résister ancre.<br /> <br /> Adrienne : demain ce sera plus drôle, enfin je l'espère.
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A
brrr... je viens de lire Les déferlantes, je n'étais déjà pas d'humeur très folichonne, mais alors ceci...<br /> ;-)<br /> rassurez-moi, dites-moi qu'il y a une lueur d'espoir au bout du tunnel de la détresse
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L
c'est bon aussi de se perdre : c'est une forme de résistance à "l'acceptable". Histoire très touchante.
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C
La photo est terriblement belle, attirante.<br /> <br /> Le texte, j'aime que tu me fasses rire mais quand tu distilles l'émotion... je crois que je préfère.
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D
... mortes.
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