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1 octobre 2011

Le décalage horaire

Quand j’ai dit à mon patron que j’étais en retard à cause du décalage horaire,  il m’a asséné un  « Vous, vous fichez de moi madame Dupont, vous étiez dans la Creuse !» Je lui ai répondu vertement. Il faut dire que  j’en ai marre d’être pressée comme un citron ! Je lui ai expliqué que si la Creuse était sur le même fuseau horaire que Paris, je devais néanmoins me réadapter au rythme parisien. Et j’ai conclu énervée.

- C’est pas parce que j’arrive avec une malheureuse demi-heure  de retard que la terre va s’arrêter de tourner !

Bien sûr il n’a rien voulu entendre. Mon patron fait partie de ces hommes qui ont toujours raison quoiqu’il arrive. 10 ans que je travaille avec lui, 10 ans de harcèlement subtil, alors un jour on finit par dire « Halte là ! »

Il est resté silencieux un instant, puis il m’a posé une question que j’ai jugée anodine. J’ai eu  tort de ne pas me méfier :

-    Madame Dupont, m’a-t-il dit de son air le plus affable, combien d’années de maison avez-vous ?
-    10 ans, lui ai-je répondu surprise de ce brusque revirement de ton.

Et là, je ne sais pas ce qu’il lui a pris : il a desserré le col de sa chemise, tombé sa veste, il a ânonné des onomatopées bizarres d’une voix rauque, puis il s’est rué sur moi comme un fou. Avant que j’aie pu faire quoi que ce soit, ses mains emprisonnaient mon cou et il m’aurait tuée si Dumontier, le chef du service logistique, n’était pas grimpé à califourchon sur son dos pour qu’il lâche prise.

Ce jour-là, j’ai compris que mon patron me haïssait au point de vouloir me tuer. C’était il y a trois mois. Depuis, je suis en arrêt maladie. Je reste chez moi. A chaque fois que je veux mettre un pied dehors, j’ai peur qu’on ne veuille m’étrangler, alors je rentre.

Chez moi je ne fais rien. Je passe mes journées à regarder mon cou dans la glace. J’ai encore la trace de ses mains sur ma peau, comme des stigmates. J’ai beau y mettre toutes les crèmes du monde, les traces ne disparaissent pas. J’en ai parlé à mon médecin, lui non plus ne comprend pas, mais il essaie de me rassurer. Il me dit invariablement, de sa voix calme qui finit par m’horripiler « Tout va rentrer dans l’ordre Madame Dupont, ne vous inquiétez pas. »

En tout cas, moi, j’ai l’intuition que  rien ne rentrera plus jamais dans l’ordre. Je vis en décalage permanent, j’ai peur…

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