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Presquevoix...
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20 septembre 2011

La CPAM

Quand il reçut un nouveau courrier de la CPAM qui lui demandait une photocopie de ses trois derniers bulletins de salaires, il ne put contenir sa rage. Il gueula qu’il allait les foutre sur la gueule, que c’était tous des connards. Il descendit dans son atelier, saisit une clef à molettes de 12 et un marteau – au cas où -  qu’il mit dans son sac à dos, puis il se rendit à l’arrêt de bus. Il lui fallut une heure pour arriver  à la Caisse Primaire d’assurance maladie. Il avait l’air calme, mais ses mains moites trahissaient sa colère.

Une fois sur place, il prit un ticket et attendit patiemment son tour. Quand son numéro clignota,  il se leva immédiatement. L’employée à lunettes le regarda à peine et il attaqua bille en tête.

-    Je veux mes indemnités.
-    Votre nom, prénom et numéro de Sécurité Sociale, s’entendit-il répondre d’une voix neutre.
-    Mes indemnités, hurla-t-il.
-    Votre nom, prénom et numéro de Sécurité Sociale, reprit l’employée de sa voix de robot.

Si elle avait montré plus d’humanité, sans doute n’aurait-il pas sorti son marteau…

19 septembre 2011

L’hôtel

MERS-LES-BAINS 03-07-11 (1)Ils s'étaient arrêtés devant ce qui avait dû être un hôtel et il lui avait dit.

- Tu te souviens, la première fois ?

Elle avait un instant regardé la maison, le regard absent, puis un vague sourire était apparu sur ses lèvres.

- Alors ? Avait-il insisté.

- Je ne sais pas, avait-elle répondu en secouant plusieurs fois la tête, je ne sais plus.

Ils reprirent leur marche, côte à côte, en silence. Il avait espéré que, peut-être, à Mers, elle se souviendrait, mais il était sans doute encore trop tôt ...

 

 

PS : texte écrit à partir de cette photo, prêtée par Patrick Cassagnes.

 

18 septembre 2011

Les chats

Depuis quelques semaines, dans le quartier de la Victoire, les chats mouraient comme des mouches. Déjà une quinzaine d’entre eux avaient disparu et 10 cadavres avaient été retrouvés, tous empoisonnés. Les propriétaires – souvent des personnes âgées – étaient inconsolables, et on avait fini par mettre la police sur l’affaire.

Des lettres anonymes l'avait conduite à s' intéresser aux propriétaires du numéro 40, une maison gigantesque où des tessons de bouteilles dissuasifs avaient été placés en haut des murs.

-    Je suis sûre que c’est pour que les chats s’empalent, avait souligné Madame C, 85 ans - propriétaire de 4 chats, dont deux disparus - à l’un des policiers qui l’interrogeait.

La première semaine de septembre fut la plus meurtrière, au point que les vieilles dames du quartier organisèrent des brigades de surveillance. Elles circulaient jour et nuit, par groupe de trois. C’est la brigade de Mademoiselle Marguerite  qui découvrit l’assassin. Et quelle ne fut pas sa surprise : il s’agissait du curé de la paroisse. Les vieilles dames hésitèrent presque à en parler au commissaire, mais Mademoiselle Marguerite dit clairement  qu’il ne s’agissait pas de mollir, que le rôle d’un curé était de semer l’amour, pas la mort !

Quand celui-ci fut interrogé, il ne nia pas. Il ajouta même que les dix plaies d’Egypte, à côté des chats du quartier, ce n’était rien !

17 septembre 2011

Les excuses

Encore un jour passé à chercher des excuses* ! Je me demande s'il y a un jour, un seul jour de ma vie, où je ne me suis pas cherché d’excuses. Je crois qu'il y a 40 ans, si j'avais pu me trouver une excuse valable, je ne serais jamais sorti du ventre de ma mère. Enfant, j’avais toujours l’excuse à la bouche, comme d’autres ont le sourire aux lèvres. J’inventais des excuses pour ne pas rentrer à l'heure, ne pas faire mes devoirs, ne pas faire les courses, ne pas aller au piano, ne pas me coucher... Je me souviens même, qu'un jour où j'avais séché les cours, j'avais dit que j’étais allé à l’enterrement de ma grand-mère alors qu'elle était toujours vivante ! 

40 ans de ma vie à me chercher des excuses, et aujourd'hui, mon problème, c'est que je cherche une excuse que je ne trouve pas ! Vous me direz : ce n'est pas possible, avec l’expérience qui est la tienne, tu ne peux pas ne pas te trouver une excuse ! Hélas si, aujourd'hui, je cale. Panne sèche. Il faut dire que le problème est un peu plus délicat. Je veux me suicider et je me demande ce que je vais bien pouvoir écrire à ma femme...

*phrase lue sur le blog de « blues »

16 septembre 2011

Le blues du mariage

Elle était entrée en dépression après la cérémonie du mariage, au moment exact où elle avait enlevé sa robe blanche. Depuis, quoiqu’elle fasse – elle avait même lacéré sa robe de mariage pensant que cet acte barbare l’aiderait à prendre un nouveau cap -  elle ne pouvait se débarrasser de cette mélancolie qui lui collait à la peau…

15 septembre 2011

Le buste

Quand on entrait dans le bureau du Directeur, on ne pouvait manquer de remarquer, à droite de son secrétaire  en acajou, son buste en plâtre ; et sur le mur du fond, dans un grand cadre doré, on pouvait voir une photo de lui avec des dédicaces toutes aussi élogieuses les unes que les autres.

Dans l’entreprise, ce buste intriguait, mais on s’abstenait de le commenter, au cas où. Jusqu’au jour où « le patron » sortit furieux de son bureau.

-    Quel est le con qui a osé ? Hurlait-il.

Il venait de trouver son buste affublé d’oreilles de Mickey,  on  y avait également dessiné une petite moustache noire qu’Hitler n’aurait pas reniée.

On suspecta d’abord Thierry, le délégué CGT ; puis Sabrina, la déléguée FO. Ensuite, il y eut cette lettre anonyme qui changea la donne :

       «  On ne fait jamais assez attention à ceux qui nous sont les plus proches »

La secrétaire du Directeur, Françoise – appelée « l’éteignoir » – fut alors en ligne de mire…

14 septembre 2011

Les boules

Après chaque jet de boule, qu’il pointe ou qu’il tire, René ne pouvaient s’empêcher de dire à voix haute « Putain con ». Son partenaire, maire et ancien médecin de la commune de Roubignale, excédé par ce leitmotiv, finit par lui dire un jour.

-    Putain con, Putain con, vous n’avez que ça à la bouche, René.

René se contenta de dire au maire que c’était son tour. Le maire joua, et mal, comme d’habitude.  René lui dit.

-    Putain con, M. le maire, je crois que moi aussi je vais arrêter de faire équipe avec vous. Vous savez ce qu’on dit de vous ici ? Que vous êtes le plus mauvais joueur de boules de Roubignale.

Le visage du maire pâlit, puis il répondit.

-    Putain con, René, c’est ce qu’on va voir !

Il pointa et sa boule se logea juste à côté du cochonnet. René hurla.

-    Putain con, vous voyez M. Le maire ; Putain con : ça sert à ça !!!

13 septembre 2011

Le courrier

Il avait tellement peur d’avoir de mauvaises nouvelles qu’il n’osait plus ouvrir sa boîte aux lettres et, quand il le faisait – parce qu’il ne laissait personne d’autre le faire – c’était en apnée.
Quand on sonna, ce mardi 6 septembre, il sentit son estomac se nouer. Il s’agissait du facteur. En lui disant bonjour, il fondit à larmes et Le facteur ne comprit pas ce qui se passait.
- Un recommandé, monsieur Durand.
- Vous êtes sûr que c’est pour moi ? Sanglota-t-il.
- Oui, c’est votre nom et votre adresse, il n’ y a pas de doute, c’est pour vous.
- Ca vient d’où ?
- Des impôts.
- Mon dieu, je le savais, je n’en veux pas !
- Mais je ne peux pas repartir avec, vous êtes là. Si je ne vous le donne pas, c’est moi qui vais avoir des problèmes.
- Dites que je n’habite plus à cette adresse, et il  ferma la porte au nez du facteur.
Celui-ci griffonna sur le papier “ le destinataire m’assure ne plus habiter  à l’adresse indiquée” et il repartit avec le recommandé.

12 septembre 2011

Perdre

Tout n’est pas perdu, lui avait dit son ami pour le consoler. Facile à dire quand on n’a, soi-même, jamais rien perdu. Lui, il n’arrêtait pas de perdre : son boulot, sa petite amie, son appartement, ses cheveux et pour finir, il venait de perdre une dent, comme ça, alors que rien ne l’y avait préparé.

11 septembre 2011

La rentrée

Dès que Martine l’a vue,  elle s’est précipitée sur elle.

-    Alors ? La rentrée ? Comment c’était ?

Isabelle savait parfaitement que si Martine lui posait cette question, avec cet air détaché, c’est que la rentrée, elle, elle ne la ferait plus jamais. Depuis juin, Martine était en retraite !

Isabelle a essayé de ne pas lui en vouloir et d’oublier qu’elle,  elle ne serait peut-être jamais en retraite – elle a rapidement calculé de tête qu’ayant commencé à travailler à 28 ans, il lui faudrait accomplir 42 ans de service, que 42 plus 28, ça faisait 70, et que 70 ans, c’était l’âge où sa mère était morte !

Afin de ne pas donner à Martine de motifs de satisfaction supplémentaire, elle s’est essayée à l’enthousiasme.

-    Je dois dire que je n’ai jamais connu une aussi bonne rentrée ! Je n’en reviens pas moi-même !

Son amie l’a regardée surprise,  mais n’a pas fait de commentaires.

-    Et toi ? a ajouté Isabelle - la retraite, à quoi ça ressemble ?
-    Oh, je n’ai pas eu le temps d’y goûter vraiment. Je te dirai ça dans 1 an. Il faudra qu’on prenne un thé ensemble un de ces jours, quand tu auras le temps.

Quand tu auras le  temps ! Martine faisait certainement exprès de lui retourner le couteau dans la plaie. Isabelle l’aurait volontiers étranglée. Mais soudain elle lui a dit, assez contente d’elle-même.

-    Tiens, au fait, tu connais cette définition de la retraite ? La retraite, c’est comme les grandes vacances, sauf qu’à la fin, on meure.

Martine n’a pas ri. Décidément, même à la retraite, Martine n’avait aucun sens de l’ humour.

 Isabelle a passé son après-midi à préparer des cours, à repasser le linge en retard, à nettoyer la cuisine et la salle de bains, à préparer le repas du soir et ensuite, elle a attendu sagement l’heure du dîner en se prenant un apéritif.

A la première gorgée de porto, son corps s’est réchauffé, et à la deuxième, il lui est revenu cette phrase de Stendhal qui ne la quitterait plus désormais : "Il faut secouer la vie, autrement elle nous ronge".

PS : texte écrit dans le cadre des « impromptus »

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