Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Presquevoix...
Archives
31 août 2011

L’oeuvre

 De toute sa vie, il n’a peint qu’une seule œuvre, son autoportrait, jour après jour, sans jamais se lasser.

30 août 2011

Comme d’habitude

Vêtue d’un déshabillé vert amande, légèrement transparent, elle se dirigea vers son mari et lui dit en souriant.
-    Comment me trouvez-vous Jean Philippe ?
Il leva la tête de son journal, la considéra d’un air distrait et lui répondit.
-    Comme d’habitude, Maud, comme d’habitude.
Son indifférence lui fit l’effet d’une douche froide. Elle s’avança vers la table du salon, prit  le cendrier ou mouraient les cendres de son dernier cigare et elle le renversa   par terre.
-    Mais vous êtes folle Maud, cria Jean Philippe.
Maud répliqua calmement, tout en regardant les cendres étalées sur la moquette.
-    Folle, moi ? Allons donc, je suis comme d’habitude Jean Philippe, comme d’habitude.

29 août 2011

Insomnie

Vous êtes-vous déjà penchés  sur vos insomnies ? Moi oui, et je vous le déconseille, bien que je sache que donner des conseils n’a jamais servi à rien, ni à personne. Mais laissez-moi vous raconter mon histoire. Quand je ne peux pas dormir, ce ne sont pas  les moutons que je compte, mais les marches et en même temps que je compte les marches,  je les monte. Ma dernière insomnie fut longue, très longue, j’ai dû monter 1500 marches ; à la fin j’étais épuisée. Quand je  suis arrivée à la mille cinq centième marche, je me suis penchée pour voir de quoi mon insomnie avait l’air et c’est là que j’ai basculé. Cette chute m’a été fatale. Plus d’insomnies, certes, mais la mort, rien que la mort…


PS : texte écrit dans le cadre des « impromptus littéraires »

28 août 2011

L’abattoir

C’est à Pôle Emploi qu’il avait trouvé ce job à l’abattoir. Dans ce département terrassé par la crise – sa femme  y avait été mutée par son entreprise - il n’y avait rien à faire, si ce n’est regarder les nuages et la pluie. Et puis un jour, sa femme s’était lassée de le voir tourner en rond et elle l’avait sommé d’accepter ce qui se présentait. La seule option avait été l’abattoir.

Le premier jour, il avait failli vomir, voir les poulets suspendus à des crochets sur une chaine automatique avant d’être plongés dans un  bain à électronarcose, puis saignés, déplumés et éviscérés, ça lui minait le moral. D’ailleurs, quand il rentrait chez lui, il passait une heure dans la douche à se récurer de fond en comble avec une brosse à laver le linge qui lui laissait des marques rouges sur sa peau blanche. La nuit, parfois, il faisait des cauchemars et s’imaginait lui-même suspendu à un crochet avant d’être plongé dans un bain glacé qui lui donnait la chair de poule.

Et puis il y eut le fameux jour, celui qui signa définitivement la fin de son contrat. D’ailleurs le chef lui avait tout de suite dit de rentrer chez lui ; que c’était mieux pour lui, et aussi pour les poulets. Oh,  il ne s’était pas passé grand-chose ce jour-là, mais il avait détaché dix poulets de la chaîne en disant qu’ils  lui avaient demandé de leur laisser la vie sauve. Personne n’avait pu le raisonner.

Le médecin l’avait mis sous Prozac et lui avait conseillé de regarder des dessins animés de Walt Disney pendant quinze jours,  ça lui ferait du bien…

27 août 2011

La vie en rose

P8170080C'était l'exact reflet du ciel la nuit où nous avons disparu à jamais. Je m'en souviens encore et je suis presque heureuse - je dis bien presque - parce qu'à cet instant précis j'ai vu la vie en rose. Je garderai cette sensation pour l’éternité, mais peut-on être sûr de ce que l’on gardera pour l’éternité puisque l’éternité nous dépouille de tout…

PS : photo prise par C. V. dans la Creuse en 2003

26 août 2011

Le maillot de bain

Quand elle était apparue en maillot de bain islamique sur la plage de Nice,  elle avait éclipsé toutes les autres filles, même les bimbos en string. En l’espace d’un quart d’heure, elle était devenue une star et, le lendemain, elle avait même eu droit à un article dans Nice matin. Quand elle l’avait lu, elle s’était dit qu’elle y était peut-être allée un peu fort et que si son père tombait dessus...
Il faut dire que dans la vraie vie, elle ne s’appelait pas Halima mais Camille, elle n’était pas musulmane mais vaguement catholique, elle n’avait pas six frères et sœurs  mais était fille unique, son père ne tenait pas un kebab à Paris  mais  une imprimerie à Rouen, et sa mère n’était pas mère au foyer mais travaillait comme assistante sociale...


25 août 2011

Lourdes

A 18 h 00,  il  s’est faufilé entre religieux en habit, malades en fauteuil roulant et brancards pour atteindre le centre-ville. Le matin-même, il avait voulu  acheter  la « médaille Bernadette »,  mais elle était trop chère et de toute façon il n’avait plus d’argent. Quand il est entré dans le magasin Sainte Geneviève avec son pistolet  à la main, il a gueulé, la voix mal assurée.


-    Que personne ne bouge ! Je prends une médaille Sainte Bernadette,  une vierge en résine, deux chapelets en argent, un flacon d’eau de la grotte et je me tire, je vous ferai pas de mal si vous bougez pas.


Avant de partir avec son matériel, il leur a expliqué  qu’il était au chômage depuis quatre ans, en fin de droits et qu’il n’en pouvait plus, c’était sa dernière chance ! 
Quand il est parti, la vendeuse a murmuré « Amen » et s’est évanouie.

Presquevoix...
Newsletter
8 abonnés