Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Presquevoix...
Archives
24 juillet 2010

Pause

P7220720Vacances de blog,  retour  le  19 août.

Juste pour le plaisir, cette citation de Flaubert :

L'avenir nous tourmente, le passé nous retient, c'est pour ça que le présent nous échappe.

PS : photo prise par C. V. à St Lizier, Ariège, en juillet 2009.

23 juillet 2010

Les vacances ratées

Ils devaient partir en vacances au Pérou, mais dix jours avant le départ, elle fit une phlébite et le médecin lui interdit de prendre l’avion même avec des bas de contention. Son mari fit contre mauvaise fortune bon coeur, mais se taire n’était pas dans ses habitudes ; elle lui gâchait ses vacances. Alors, chaque soir, juste avant le dîner, il lui faisait un point sur l’étape qu’ils auraient dû faire dans la journée. Le voyage au Pérou lui fut ainsi minutieusement conté, carte en main, étape après étape -  Cuzco, Chincheros, Ollantaytambo, Machupichu, Canyon de Tinajani, le lac Titicaca, Llachon, Juliaca, Lima... - et il semblait y prendre un plaisir certain...

22 juillet 2010

Le masque

Enfant, quand il allait chez sa grand-mère, il n’y avait pas de vraies toilettes, juste un trou, un broc, et du papier journal qui  laissait des caractères énigmatiques sur ses fesses blanches. Il détestait  aller aux « cabinets » à cause des odeurs et des mouches. Un jour, il trouva un moyen pour rendre l’opération supportable : il mit son masque de plongée, son tuba et il y entra d’un pas résolu. La chose s’était mieux passée qu’à l’habitude mais quand il en sortit, il tomba sur sa grand-mère dont la vue baissait passablement. Elle poussa un cri perçant et hurla en gesticulant :
- Nicole ! Nicole ! Viens voir !
Quand sa mère arriva, l’enfant n’eut pas le temps de s’expliquer, elle lui donna une fessée mémorable pour avoir fait peur à sa grand-mère.
- Mais tu veux la tuer, c’est ça ? Avait-elle répété à plusieurs reprises...
Il fut interdit de masque et de tuba pendant un an.

21 juillet 2010

Le secret

Le matin, il partait à 8 heures, sans faire de bruit, avant qu’elle ne finisse son petit déjeuner et il revenait le soir vers 18 heures comme si de rien n’était. Sa discrétion était telle qu’elle ne s’autorisait pas à lui faire de réflexion. Un jour, pourtant, elle le suivit ; non par jalousie, mais par curiosité. Et la vérité lui apparut, toute crue : pendant la journée il se faisait appeler Boris chez les voisins du bout de la rue et le soir, chez elle, c’était Etienne. Le goujat  avait une double vie !
Elle finit par l’accepter. Après tout, son amour paraissait intact. Il ronronnait avec autant de bonheur qu’avant et il se blottissait toujours aussi affectueusement au creux de son ventre quand elle s’endormait le soir. Maintenant elle pouvait même en  rire :
- Quand je pense que tu me trompes !
Et à chaque fois il lui répondait par un miaulement qui lui fendait l’âme.

PS : mes remerciements à Danalyia, pour m'avoir raconté de nombreuses  histoires de chats...

20 juillet 2010

Les minutes sont bleues (texte de caro-carito)*

pagenas36C’est l’absence qui m’a fait sursauter. L’absence du carillon, l’horloge silencieuse. Qui avait eu le réflexe de faire taire le temps alors que le corps de ma mère avait déjà déserté la maison. Mon frère aîné? Non. En bon mécréant, il avait bien gardé quelques traditions séculaires, mais pas celle-là. La mort ne l’intéressait pas, juste l’argent qui pouvait surgir inopinément et qui épongeait le train de son luxe tapageur qui lui tenait lieu de raison de vivre.

Tu n’es plus là, maman. Et soudain, dans cette cuisine inchangée depuis l’enfance, je repensais à toi. Tes mains blanchies par la farine pour prodiguer des tartes aux pommes fondantes. Tes obsessions radiophoniques, comme cette émission sur les découvertes scientifiques à laquelle tu ne comprenais goutte et pourtant à laquelle tu ne dérogeais jamais. Grâce à elles, tu émaillais ton discours journalier de théories plus farfelues les unes que les autres. Tu m’inculquas qu’il fallait sept heures de sommeil et même huit pour conserver une allure de jeunesse et combattre l’apparition des rides disgracieuses. J’appris aussi, tour à tour, que le vin était nocif ; puis non, tout compte fait, pas plus que l’eau du robinet et le lait des vaches. Tu nous offrais, tous les six mois, une collection de boîtes blanches, capables de fortifier un régiment de hussards. Et ton obsession de la forme à tout prix, mentale et physique, nous a traînés, fratrie originelle et rejetons desdits, pendant les ennuyeuses vacances et une année scolaire réglée comme papier musique, des bassins chlorés aux escapades en train et en voiture. Nous formions une troupe docile, nourrie de sandwichs épais, voguant vers la découverte d’une crypte glacée ou d’un élevage de yacks. Remarque, de cette manière, tu as su ainsi édifier, en mélangeant expérimentation pavlovienne et cartes génétiques, deux lignées bien distinctes : des fils nonchalants et quatre petits-enfants - j’y inclus ma fille - dotés de ce même caractère dominant. Et le reste, soit trois au total, résolument hyperactifs. Dont moi, ta fille.

J’ai essayé de remette en marche l’horloge, cette maison devient inquiétante sans sa berceuse mécanique. Je n’ai pas retrouvé la clef mais je tiens en main l’épais trousseau que tu égarais quotidiennement. J’aurais aimé trouver celle qui ouvrait la voix des contes dont tu étais friande et que tu nous faisais goûter chaque nuit après les huit coups métalliques. Le récit achevé, tu scellais notre dormir d’un baiser rapide et nous nous tenions tranquilles sous l’épais édredon. Sauf la nuit où j’ai regardé, accroupie derrière la porte entrebâillée, ce film dont les images me terrifient encore : le tigre du Bengale. Tu n’as pas été dupe de cette désobéissance mais les cauchemars qui suivirent te semblèrent sans nul doute un juste châtiment. Car, non contente d’être peu chaleureuse et de nous distiller des jugements définitifs, avançant qu’il te fallait nous protéger de nos natures faibles et d’un demain que tu craignais, tu noircissais à loisir les fables que tu nous contais. Ainsi la Belle au Bois dormant s’était vue dotée d’une marraine si maladroite qu’elle l’avait écrasée au berceau. Je passe les opérations de chirurgie esthétique que le prince avait dû lui offrir après son long sommeil (réparateur, mon œil !). Je me suis longtemps demandé le pourquoi de ses fantaisies parfois cruelles. Je m’en suis abstenue. Après tout, les rares fois où je me suis enquis du pourquoi de telle réflexion que je jugeais blessante, tu m’avais invariablement rétorqué : « Moi, j’aurais dit ça ? Jamais ! Tu rêves, tu es ma petite fille… » Et ton sourire faisait passer le souvenir. Pas l’amertume, enfin pas tout de suite, il fallait encore quelques tours de cadran et le baume ressassé de ces minutes bleues où tu nous témoignais un peu de tendresse.

C’est fait, j’ai senti le cliquetis léger et le mécanisme qui se met en branle. Il est temps pour moi de m’habiller. Vois-tu, j’ai accepté de m’occuper des formalités administratives, laissant le soin aux frangins de s’occuper qui, du cérémonial, qui, de l’homélie. Il y a toujours quelque chose de rassurant, quand un drame vous assaille, à se pencher sur des chiffres et des mots soigneusement rangés. De les ordonner, de s’accrocher au réel. De composer avec soin un numéro de téléphone inconnu. J’oublierai, une heure ou deux durant, qu’après-demain, je suivrai cette longue caisse, qu’il fera beau, que décidément je ne supporte pas le parfum coûteux des fleurs exotiques. Je mélangerai le nom d’une tante que je n’aime toujours pas avec celle de la quatrième femme de mon parrain. Au moment où je jetterai une rose blanche dans ce trou aveugle - oui Lucas a décrété que les roses, évidentes pour cet ultime adieu seraient blanches - je me maudirai de ne pas t’avoir posé cette question : me mentais-tu quand tu avais promis, ce jour où je souffrais, où je cherchais un souffle précaire, où la minute qui allait suivre semblait déjà entamée par une ombre de cendres, d’être toujours là ? Je sens encore ta main tremblante soutenir la mienne et ton regard, serein, plein d’affection qui balayait tout doute et me clouait à la vie. J’ai toujours cru depuis que tu ne partirais jamais.
Je me suis endormie, maman. La demi-heure de l’horloge m’a réveillé de son baiser léger. J’ai juste le temps de dérougir mes yeux pour n’avoir qu’un retard acceptable, au bout du fil, ce croque-mort avait la voix d’un comptable. Une touche de poudre de riz, une pointe de crème. Maman, tu n’es plus là, n’est-ce pas ? Pourtant c’est bien toi, ce visage, ce sourire, à mes côtés, dans le miroir ?

*Explication : A partir de ce collage de Patrick Cassagnes, Caro-carito du blog « les heures de coton » et moi-même avons décidé d’écrire un texte, juste pour voir ce qu’un même collage pourrait nous inspirer. Une consigne malgré tout :  le thème de la  douceur pour Caro-carito, et pour moi, celui de la violence.
Le texte de Caro-carito se trouve ci-dessus, le mien est sur
son blog.

19 juillet 2010

Le mousseux

Le visage rouge, la mèche grasse collée sur le front et le pantalon noir de crasse, il faisait la manche pour manger. Un alcoolique, pensa-t-elle, c’était sûr. Elle fouilla malgré tout dans son sac et lui donna ce qui traînait : un euro. Elle eut la vague sensation que c’était trop, mais elle n’allait pas chipoter tout de même.
Une heure plus tard, assise à la terrasse d’un café en train de lire son journal, elle le vit qui revenait vers le manège, titubant, la bouteille de mousseux à la main. Ah c’est trop fort se dit-elle, le toupet ! Ni une ni deux elle se leva :
- C’est à ça que servent les euros qu’on vous donne ?
- Ta gueule, répondit-il. J’ fais c’que j’veux d’mon argent !
- Quand je pense que je vous donnais ça pour manger !
- Tu m’fais chier avec ta morale à deux balles, tire-toi ou j’te casse la bouteille sur la tête !
Au moment où elle allait partir, certaine que cet ivrogne était incurable et que la prochaine fois elle ne lui donnerait rien du tout, il s’approcha d’elle et fit un rot sonore dont elle se souvenait encore. Avant de s’éloigner à grandes enjambées, elle lui cria juste :
- Connard de poivrot ! Et elle accéléra le pas pour qu’il ne puisse pas l’atteindre avec sa bouteille de mousseux...

18 juillet 2010

La courte échelle

Les garçons ne savent pas toujours ce qui les attend quand ils font la courte échelle aux filles...
Pour lire le texte,
c’est ici.
Le texte est de gballand et le montage de Patrick Cassagnes

17 juillet 2010

Les seins

Il l’avait rencontrée le jour de ses 82 ans, elle en avait 32. Il avait alors un compte en banque aussi rebondi que la paire de seins qu’elle mettait en valeur dans des toilettes affriolantes. Deux ans plus tard, elle s’était envolée et son compte s’était considérablement dégonflé.
Il n’avait plus pour se consoler que le souvenir de ses deux seins gorgés de sève où s’étaient parfois attardées ses mains tremblantes...

16 juillet 2010

Au suivant* !

Il était 10 heures au café de la poste et la journée promettait d’être chaude. Tous sur leur starting block, alignés au comptoir, ils étaient prêts à avaler leur verre de bière ou de pastis. A midi pile, la course se terminerait et ils rentreraient manger chez eux, avant les boules de l’après-midi et le journal de 20 heures.
Quand un verre se vidait, le client disait immuablement  au patron :
- Quand t’auras cinq minutes Michel, tu m’en remettras un !
Et le patron avait toujours cinq minutes...

* pour l’émotion et le plaisir, la chanson de Jacques Brel « Au suivant »...

15 juillet 2010

La danse western

Quand il enfilait ses bottes western et sa chemise à carreaux, il avait l’impression d’être quelqu’un d’autre. D’ailleurs, dans le groupe de danse, ils avaient tous pris un prénom d’emprunt : lui, c’était Gordon, mais il y avait aussi Prissy, Marilyn, Lou, Dylan, Jack, Chris, Tess, Joan...
Son seul problème c’était le chapeau obligatoire ; Il transpirait énormément de la tête et au bout de la deuxième danse, il était en nage ; c’est ce que lui avait fait remarquer Marilyn qui dansait sur la même ligne que lui. Il aurait pu lui répondre que ses auréoles sous les bras n’étaient pas vraiment « glamour » mais il était charitable. De toutes façons, Marilyn n’avait pas une tête de Marilyn, alors il n’y avait aucune raison pour qu’elle ait des aisselles de Marilyn !
La chanson qu’il préférait, c’était « Dancing violins ». Il ne comprenait rien aux paroles - il n’avait jamais balbutié dans sa vie que quelques mots anglais et encore, d’oreille -   mais les pas et la musique le mettaient dans un tel état de transe que Marilyn lui avait dit, lors de leur dernière représentation,  qu’il ressemblait à un vrai cowboy ! Il n’en était pas peu fier...

1 2 3 > >>
Presquevoix...
Newsletter
9 abonnés