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Presquevoix...
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16 septembre 2008

Le petit déjeuner est servi

- Le petit déjeuner est servi !

Elle ne se levait que lorsqu’elle entendait  crier cette phrase dans le jardin de la maison familiale où ils avaient coutume de passer leurs vacances d’été. Le petit déjeuner était toujours servi dehors, quand il faisait beau, mais jamais par elle. Elle préférait paresser dans son lit à se remémorer les hommes qu’elle avait « eus », humant l’odeur de pain grillé qui arrivait jusqu’à ses narines. Elle se levait au dernier moment. Quand elle s’asseyait à table, son frère la regardait toujours d’un air mauvais, mais elle s’en contrefichait ; elle savait qu’il était jaloux de ses conquêtes qu’elles alignaient comme autant de papillons épinglés dans sa collection estivale.
Ce matin-là, elle arriva la dernière, comme d’habitude, et elle fut accueillie par une remarque acerbe de son frère.

- Il y a les « Tout Pour Ma Gueule » et puis il y a les autres ! 

Elle ne releva pas, dit bonjour, s’assit et saisit une tartine qu’elle beurra lentement, d’un air détachée. Elle entendait le murmure des voix mais ne participait pas à la conversation. Elle voulait encore savourer son aventure de la veille, un homme qu’elle avait rencontré au « Bar du port ». Il l’avait raccompagnée chez elle, tard dans la nuit, et leurs bouches ne s’étaient quittées qu’à trois heures du matin. 
Est-ce qu’elle le reverrait celui-là ?

- Putain, mais fais attention ! Cria son frère à son adresse.

Elle regarda sa tartine et se rendit compte qu’elle était entrain de beurrer sa main gauche. Elle  posa le pain sur la table, sourit bêtement et s’essuya la main.

- Tu as l’air fatiguée ma petite fille, remarqua sa mère.
- Forcément, hurla son frère, elle passe ses soirées à baiser ! Putain, mais vous êtes tous aveugles ou quoi ?

Elle pâlit. On entendait juste le bruit des cuillères dans les bols et le soleil matinal s’amusait à glisser au travers des branchages. Rien ne fut prémédité, mais au moment où elle vit son frère se lever de table, elle se décida à  lui porter l’estocade.

- Et alors, qu’est-ce que ça peut te foutre ? Baiser c’est quand même mieux que se branler tout seul dans sa chambre !

A partir de ce jour-là, il ne lui adressa plus la parole. C’était il y a 20 ans.

* nouvelle écrite à partir d'une consigne des "impromptus littéraires"

Commentaires
G
Non, j'ai juste participé à de nombreux ateliers.
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L
Non, vouis oui?<br /> <br /> Belle journée gballand<br /> Amitiés
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G
Merci de ces remarques encourageantes. Animez-vous des ateliers d'écriture ?
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L
J'ai ri, vraiment, pour de vrai, j'ai éclaté de rire quand elle se tartine la main de beurre.<br /> Je ris encore, pardon... En fait ton texte bien que triste dans la "séparation pour un rien" est drôle, frais, léger, je l'ai bu d'un seul trait.<br /> Bravo et merci, il va me rester en mémoire quelques temps, comme la scène anthologique d'une comédie dramatique...
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A
Rancunier le frère.
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