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Presquevoix...
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26 juin 2007

Peut-on être une Victime des mots ?

J’ai lu, il y trois jours, dans Libération, un article sur le procès qui a opposé Pierre Jourde* (auteur de Pays Perdu) à des habitants de ce village perdu qui l’ont  agressé pensant s’être reconnus dans son livre.
L’un des habitants du village a dit au procès «  Lui il est poète, mais nous on  l’est pas, on sait pas s’exprimer comme lui. » Ces mots, dans leur simplicité rugueuse, m’ont émue – mais je réprouve totalement l’acte commis par ces villageois. Cette phrase ne dénoncerait-elle pas l’injustice profonde que ressent celui qui pense ne pas savoir se servir des mots, mots volatiles qui lui échappent à chaque fois qu’il essaie de les emprisonner dans des phrases qui  l'aideraient à construire sa pensée…
Notre véritable source de liberté ne  réside-t-elle pas, d’abord et avant tout, dans notre capacité à faire nôtres des mots qui nous permettront ensuite d’élaborer nos discours, précieux remparts contre la soumission ; soumission à l’homme qui,  a tôt fait d’asservir l’homme, son semblable, et de le considérer comme une marchandise ou un bien qu’il s’appropriera parce que la société le tolère.
Penser, ce peut-être aussi penser à côté, parce que les mots sont le meilleur moyen d’éventrer les idées reçues qui tuent l’homme avant même qu’il ne naisse.


* Pierre Jourde est aussi l’auteur d’un livre féroce sur la littérature contemporaine « la littérature sans estomac »

Commentaires
M
Non pas toujours, mais elle est une notion importante, la sagesse. Peut-on être une victime des mots ? Les mots sont parfois violents et entrainent alors la violence. Je lirai ce livre pour mieux saisir les nuances. Pour moi ce qui n'est pas pardonnable, c'est l'ostracisme des gens du pays envers les "estrangers". C'est drôle parce que je me posais justement cette question, sur le droit que l'on a ou pas d'étaler sur la place publique au travers d'un roman (toute ressemblance avec une personne ayant existé serait purement fortuite)la vie d'une famille et ses secrets.
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G
L'humilité serait donc toujours liée à la sagesse selon vous ? Si ce paysan a été blessé par le livre de Jourde, c'est parce qu'il a cru se reconnaître dans l'un des personnages - Jourde parle du village où ses grands parents sont nés - et ce que Jourde disait du personnage et du village perdu - mais rien ne certifait qu'il s'agissait ne lui - ne lui a pas plu... Toujours la vieille histoire des parts qu'occupent respectivement la vérité et de la fiction. Ce qui n'est certes pas pardonnable, c'est l'agression physique qu'il y a eu sur Jourde de la part des villageois.
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M
Ouais, bof, je voudrais dire mon mot sur ce billet qui m'a interpellé : le pouvoir est de plus en plus annexé au bénéfice d'une minorité qui possède l'argent, les mots et une certzine culture, et manipule la majorité silencieuse qui ne possède ni l'argent ni les mots ni même l'orthographe. Mais au fond, dans leur parfait dénuement ne sont-ce pas eux, les derniers, qui possèdent le vrai pouvoir, celui des humbles, qui correspond à une réelle sagesse ? Ce paysan m'émeut car il a dû se sentir blessé, et je trouve dommage que le poète/écrivain ait pu blesser celui qui travaille la terre. Il ne faut pas toucher à la dignité de l'homme. Quel était l'enjeu du procès ?
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G
Et l'élite connnaît parfaitement le pouvoir des mots, donc peut les envelopper des merveilleuses étoffes dont elle habillera ses fins parfois peu scrupuleuses...
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L
nous avons oublier que la vraie coupure dans ce pays, ce n'est pas seulement celle entre les riches et les pauvres, les urbains et les ruraux, mais celle entre le peuple et son élite.
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